On sortait des vacances – dont on commençait à se lasser – pour arriver à « la rentrée ». Uniforme ou tablier de classe qui avaient le pli du repassage et l’odeur du savon Persil. Des objets neufs dans le cartable, les crayons bien taillés avec la pointe luisante et dangereuse. Des gommes propres. Le petit pot de colle qui fleurait bon « le massepain ». Les cahiers qui sentaient le neuf, aux pages lisses où les fines rayures nous arrachaient la promesse jamais tenue de rester soigneuses d’un bout à l’autre. La table de multiplication au dos, qui faisait sérieux : preuve qu’on avait « fait du calcul », déjà.
On retrouvait les amies de l’année précédente, les autres aussi d’ailleurs. On se complimentait sur notre éventuelle nouvelle coiffure (un ruban dans les cheveux, des tresses, la raie au milieu ou sur le côté, une barrette –une pinette comme nous disions -, une nouvelle longueur…), rare à l’époque : on gardait souvent la même pendant des années. On se plaignait des nouvelles chaussures qu’il fallait « casser ». D’un cartable qui était celui que le grand frère avait cessé d’utiliser et sur lequel il avait fait une abominable tache d’encre.
On se réjouissait ou se désolait de la maîtresse qu’on allait avoir cette année : on la disait rosse, injuste, ou tellement gentille. Et fiancée ! Ça donnait un relief romantique, une maîtresse d’école fiancée. On imaginait qu’elle baignait dans une romance à temps plein. Si le fiancé montrait le bout de son nez, même boutonneux, on avait un « aaaaaaaaaah » secret qui soupirait dans la tête. Etre fiancée devait être le plus bel état dans le monde. Un moment de grâce.
Le premier jour était léger, peu sérieux, on parlait des vacances et de ce qu’on étudierait cette année. On prenait les présences et remarquait ainsi les nouvelles venues, silencieuses et prudentes, ces « nouvelles compagnes qu’il nous fallait accueillir », ce qui prenait quelques jours.
Et j’avais beau détester mon école, celle des primaires, j’avoue que la rentrée était un jour délicieusement excitant, différent de tous les autres. L’été se terminait souvent en toute splendeur, indien autant qu’il le pouvait, on sentait déjà en imagination l’odeur des marrons que leurs cosses éclatées révèleraient, luisants, moirés, la tache poudreuse. On anticipait le plaisir des feuillages qui allaient chanter les gloires de l’automne de tous leurs feux. Le prochain congé serait celui de la Toussaint, et déjà… on l’attendait.
Les rentrées actuelles doivent certainement avoir leurs émotions aussi pour nos petits. Mais en effet, je me souviens de ces rentrées et du plaisir de revoir les amies, la soif d’apprendre et de passer chez les plus grandes… Ah ! les nouvelles coiffures étaient déjà un sujet de discussion et une coiffure en queue de cheval qui remplaçait les tresses était déjà un passage !!!
Mais j’ai éprouvé de nouvelles émotions de rentrée des classes lorsque je conduisais mon fils à chaque rentrée… et aujourd’hui cela continue avec mes deux petits-fils pris en photo avec leur nouveau et grand cartable pour la « grande école » !
Toujours autant de bonheur en passant de ma rentrée à celle de mes petits.
Mais je continue les vacances 🙂 en attendant « ma » rentrée qui correspondra à la fin de ce bel été.
Très beau premier week-end de septembre !
Merci Angedra… Oui ce sont des moments émotionnants pour chaque génération, et donc les enfants d’aujourd’hui y engrangent les beaux souvenirs de demain comme nous l’avons fait 🙂
A toi aussi un excellent week-end!
Tout à fait ça Edmée ! Sauf que j’avais horreur de l’école et donc de la rentrée. Me retrouver dans une classe pleine de gosses qui ne me plaisaient pas, (à part une demi douzaine et encore !) me coltiner le car qui me donnait la nausée (mes écoles furent toujours loin de chez moi) étaient déjà des pensums ! Sans parler que l’école me fatiguait et que je briguais la dernière place avec deux ou trois autres. Autrement, c’était bien ça nos rentées au temps où les vacances étaient longues et que nous rentrions vraiment en automne !
Bises bretonnes chère Edmée et bonne rentrée !
Florence
Oui si tu devais en plus venir en car et que ta santé n’était pas bonne, je peux comprendre que ce n’était pas super comme rentrée 🙂
Bon week-end Florence!
J’aimais la rentrée des classes, surtout pour retrouver les copains de l’époque. Je me souviens d’une rentrée particulière, je devais avoir aux alentours de 9 ou 10 ans. La beauté de Brigitte Bardot faisait, à l’époque, l’unanimité. Certains d’entre nous cachions dans les cartables le dernier Cinémonde. Tout ça pour un merveilleux souvenir, celui de Madame Lucette Etchebez. Notre maîtresse qui savait se faire aimer de tous. Elle nous parlait de l’Histoire de France comme si celle-ci lui appartenait personnellement, et nous en faisait ainsi le cadeau. Elle était belle, portait des jupes en vichy très larges et serrées à la taille. Ses cheveux ramassés dans des chignons sophistiqués tenaient sur sa tête comme par miracle. La douceur de sa voix et l’attention qu’elle portait à chacun d’entre nous, ne l’empêchaient en rien d’être exigeante. Toujours avec son beau sourire. C’était notre B.B. Je garde d’elle un souvenir ému. Pour ce qu’elle nous a donné mais plus encore pour l’intérêt qu’elle nous accordait à tous. Personnellement je lui dois beaucoup.
Vrai que la maîtresse d’école est souvent le premier fantasme pour les garçons ou exemple pour les filles. Mlle Machin se coiffe ainsi, Mlle Machin a une jupe droite… Je me souviens avoir été jusqu’à imiter l’écriture d’une « maîtresse » qui faisait ses « d » à la grecque.
J’adore ces souvenirs, on dirait presqu’on était au cinéma tant on mettait de glamour dans la moindre chose. 🙂
Un très joli récit qui r’ouvre certaines portes en moi…
Merci sincèrement.
Oui, et dire qu’à présent, sauf pour certains épisodes, on peut se dire sans mentir que… c’était le bon temps. Alors qu’on se réjouissait tant de ne plus « devoir aller à l’école ». Quel moment béni c’était, et j’ai grand plaisir à y retourner en pensées aussi…
Que de bons souvenirs tu évoques là, merci!
Il y avait les longues après-quatre heures passées à couvrir les livres de papier bleu, et les étiquettes à écrire aussi…
Oh oui,, ce superbe papier bleu, et les gracieuses étiquettes… je n’y pensais plus! On faisait tout avec grand soin sous la poussée de nos bonnes résolutions de début d’année scolaire 🙂
La rentrée, ah oui, quel moment particulier ! Et pas seulement pour les élèves : je viens de vivre ma 32ème rentrée, tout s’est bien passé, une fois de plus, malgré l’appréhension habituelle.
Et toi tu es la gentille maîtresse qui écrit des livres!!! 😀
le congé que j’attendais était celui de la Pentecôte, parce qu’on allait à la mer à Westende 🙂
Oui mais c’était loin de la rentrée!!! Moi j’attendais déjà la Toussaint et pourtant c’était cimetières et les « paletots » et écharpes… 🙂 Nous allions à la mer en été…. presqu’un an à tirer 🙂
exactement: le congé de la Toussaint, c’était cimetières (au pluriel ;-)) et premières gelées blanches, rien qui me fasse beaucoup envie 😉
Les souvenirs que tu évoques, avec ses détails (l’odeur de la colle, la pointe du crayon, la barrette neuve, etc.) sont quasiment les mêmes que les miens : un mélange d’excitation et d’appréhension, de bonnes résolutions rarement tenues dans le temps, de joie aux retrouvailles. Eternel renouvellement d’une routine à chaque fois inédite. Nous sommes des millions, des milliards d’hommes à avoir ressenti exactement la même chose à ce moment-là, à s’être mis en rang, le coeur battant la chamade, à la toute première sonnerie de l’année scolaire.
Cela m’émeut d’y penser…
Moi aussi, justement, et il n’y a qu’à lire les réactions à ce texte. Nous y allons tous de la jolie maîtresse, des odeurs, des retrouvailles… On ignorait alors que ces moments imprimeraient tant de plaisir en nous qu’on aurait de la joie à les revivre. Et comme tu dis… c’est pratiquement un souvenir commun et identique!
Les rentrées ont souvent été difficiles pour moi car j’ai changé souvent d’école. Mes parents trouvaient toujours que quelque chose n’allait pas. Et il me fallait m’adapter à un nouveau style de discipline et à de nouvelles têtes de maître ou maîtresses et d’élèves. Finalement j’ai terminé mes études chez les dominicaines dont l’établissement se trouvait à deux pas de chez moi et cela a été une conclusion assez heureuse car j’y ai beaucoup appris : la discipline et l’effort. Nous étions comme dirait Marcel Proust « sous la loi ».
Oui, changer tout le temps d’école doit accroître le sentiment de solitude, on arrive chaque fois en « nouvelle » et je me souviens que je n’aimais pas ça non plus. Mais moi aussi je suis heureuse de la discipline et l’effort dont on m’a dotée – un peu par la force mais je me rends compte aussi que si je m’y suis « pliée » c’est que j’aimais ça, ça me convenait.
Et bien, moi aussi, j’ai fait ma rentrée…de l’autre côté de la barrière évidemment. Je crois que l’excitation que tu décris si bien existe toujours pour les élèves actuels, et je constate aussi que de plus en plus de parents prennent congé le 1er septembre (et ceux qui ne le font pas viennent presque s’excuser….). Ils sont souvent bien plus stressés que leurs enfants! Et on ne dit plus « congés de Toussaint » mais « congés d’automne »….lol.
Bon week-end Edmée.
Et pour moi ça restera la Toussaint, qui au fond n’est pas un vilain mot 🙂 Même s’il y a d’autres cultures ici, je ne vois pas pourquoi l’appellation à consonance catholique doit être vue comme une insulte au lieu d’une simple habitude. Que je sache, Hanukkah s’appelle encore Hannukah, Kwaanza aussi, et personnellement je n’en suis pas contrariée 🙂
Vive la rentrée donc, voici qu’on construit les souvenirs de demain!
Des souvenirs délicieux et charmants qui m’ont fait penser au film « diabolo-menthe », le film de Diane Kurys
http://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=19376402&cfilm=4419.html
Un petit billet nostalgique et tendre dont tu as le secret, sorellita.
¸¸.•*¨*• ☆
Je me souviens de ce très beau film aussi, pour moi c’est le film qui m’a fait réaliser qu’un papa divorcé avait du mal à quitter ses enfants… Je n’y avais jamais pensé!
Baci baci sorellita!
J’ai toujours aimé les rentrées et surtout commencer des cahiers neufs qui ne le restaient pas longtemps. C’était très excitant et à chaque fois je prenais la bonne résolution de bien travailler. J’avais beaucoup de facilités mais selon les profs je m’investissais ou non alors en tête dans certaines matières et en queue dans d’autres je me retrouvais très souvent dans la moyenne ce qui me valait bien souvent comme appréciation : « peu mieux faire ». J’ai de très bons souvenirs mais je ne regrette pas l’école. Belle journée !
J’étais comme toi: j’apprenais avidement ce qui me plaisait et étais à la traîne pour le reste. Je ne regrette pas non plus, surtout pas, mais malgré pas mal d’épisodes assez affreux, ça me fait dans l’ensemble de bons souvenirs 🙂
Comme Colo, c’est surtout de cela que je me souviens : les nouveaux livres à couvrir, le papier bleu, les étiquettes, le nouveau journal de classe…
De mes institutrices, je me souviens surtout de deux : une institutrice maternelle formidable qui avait disparu à la rentrée suivante – entrée au carmel ! (Elle en est sortie des années plus tard, sa disparition et son choix m’avaient bouleversée.) Une autre (3e primaire ?) qui portait un prénom inédit et ravissant : Hermine.
Moi je me souviens d’une qui ne serait pas flattée, mais je détestais qu’elle se penche sur moi car elle avait des aisselles méphitiques. J’ai oublié son nom mais pas son odeur ni le fait qu’elle habitait Micheroux, chaque fois que je vois l’indication Micheroux je pense à elle (heureusement pas chaque fois en détail 🙂 )…
Hermine, c’est en effet ravissant…
Ma maîtresse de 3è primaire est sur Facebook et… n’a pas changé. Bien entendu, elle ne se souvient pas de moi; mais je me souvenais d’elle à cause de son nom…
Que de bons souvenirs en te lisant, Edmée ! J’adorais la reprise des classes (jusqu’en primaire… (rire)). Etant de la même génération que toi, je me retrouve tout à fait dans ta description. Je me rappelle du nom de chacune de mes maîtresses, je me rappelle de leurs caractères si différents, l’une douce, l’autre sévère, je me rappelle de la classe, de cet escalier qu’il fallait prendre pour y accéder, de l’odeur de craie qui y régnait, enfin bref, un plaisir de lire ce billet ! Merci Edmée. 🙂
Mais oui je sais, c’est comme si j’avais organisé un après-midi « rentrée » pour les évoquer, tout le monde a un soupir ému, se souvient de telle ou telle chose et se rend compte de la place que ça a encore dans nos souvenirs! Et la messe de début d’année, et les soeurs sévères ou joviales, le réfectoire..; Les « qui joue, à papa-maman? » 🙂
de même j’adorais la rentrée. Je repense surtout à la nouvelle blouse qu’on portait. Et quel désastre si une fois arrivée sur la cour quelqu’un d’autre avait la même, ce qui arrivait très souvent. Et puis les livres à couvrir ! le car à prendre ! les copines à retrouver ! et la belle fin d’été ! ah la la ….
Oui comme tu dis… ah la la . Tant de choses qui nous ont imprégnées et nous font plaisir maintenant.
C’était un jour très attendu , quand j’étais enfant, que le jour de la rentrée..Enfin un peu de nouveauté !Les vacances étaient mortellement ennuyeuses…
Maintenant, j’ai toujours vu mes petits enfants retourner à l’école avec bonheur bien qu’ils aient la chance de psser des vacances agréables
Moi je me réjouissais aussi… parce que deux mois de vacances commençaient à lasser 🙂 Mais je me réjouissais quand elles revenaient!