Si tu m’aimes, ris avec moi…

Une chambre a New-York-Edwad Hopper-1932

Une chambre a New-York-Edwad Hopper-1932

Il ou elle ne sourit qu’en demi-teintes, avec une nuance d’indifférence, ou d’exaspération, ou de patiente condescendance… Il ou elle ne comprend pas la joie des autres, s’en distancie avec soin, a mis au point, pour s’en expliquer, l’idée que c’est futile, bête, enfantillages, manque de maturité, sottise, inutiles illusions…

L’appétit de vie ne l’a jamais touché (e)… il/elle vit un jour à la fois sans rien en espérer sinon qu’il passe sans faire mal. Sans cris, lueurs, sottises, passions, imprévus ou prévus…

Il ou elle est un conjoint que l’on se tue à espérer rendre heureux (se). Cent fois on s’est interrogé (e) : mais où donc se trouve sa porte du bonheur ?

Quand on s’est impatienté (e), on se le reproche : ce n’est pas sa faute. On a cherché mille raisons à cette tiédeur dans le grand art de vivre : une enfance comme ci, des parents comme ça, une (més) aventure mal vécue, pas de fratrie, trop de fratrie, une maîtresse d’école tyrannique ou un curé trop insidieux…

Et on est perdu (e), seul (e), dans un labyrinthe aux sons étouffés dans la pénombre. On a besoin, tellement besoin, d’être celui ou celle qui apporte un sourire dansant jusqu’aux yeux en s’apercevant au loin dans la foule, celui ou celle qui possède l’étreinte qui conforte et accueille. D’avoir la voix qui réjouit, la démarche que l’on guette  de loin… On est affamé (e) d’exister aux yeux ravis de l’autre, d’être aimé (e) de son cœur qui s’attendrit chaudement à notre pensée. On se languit de partager des sourires et des regards qui disent « on est bien ensemble, non ? ».

Mais on est abandonné (e), ignoré (e), délaissé (e). Seul (e). Invisiblement seul (e).

C’est une violence sans bruit, de celles qui font du mariage une voie sans issue et sans but…

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36 réflexions sur “Si tu m’aimes, ris avec moi…

  1. Armelle B. dit :

    C’est si vrai Edmée que l’on vient au monde avec le goût ou non du bonheur. Combien de cas n’avons-nous pas rencontrés les uns et les autres de ceux et celles qu’un rien comble et réjouit ou d’autres rongés à longueur de vie par une sournoise angoisse et un blocage total de leur faculté à prendre la vie du bon côté. Et qui pouvons-nous ? Il s’agit vraiment d’une absence de cette hormone du bonheur qui enjolive l’existence de ces merveilleuses personnes qui ont reçu le don de répandre la bonne humeur autour d’eux.

  2. laurehadrien dit :

    Heureux celui qui a reçu le don du bonheur…

  3. sandrinelag dit :

    Tellement courant, surtout chez les femmes, de les voir lever les yeux au ciel ou lancer une fléchette vénéneuse au mari qui aura eu la récurrente balourdise de sortir sa blague pour la millième fois. Le mari est bonne pâte, la femme critique tout. On le voit tellement souvent… cela donne un petit pincement au coeur.

    • Edmée dit :

      Je pensais aussi plus aux femmes en effet, dans ce rôle distant avec une pointe de supériorité insupportable. Le mari grand enfant… qu’elle présente ainsi aux enfants, d’ailleurs, pour mieux le supplanter. Moi aussi j’ai le pincement au coeur…

      Ceci dit… j’ai eu un mari comme ça. Ce fut très difficile… de simplement survivre! Mais comme on le sait, j’ai survécu 🙂

  4. Anne-Michèle Hamesse dit :

    Riez riez vous pouvez bien rier.

  5. Alain dit :

    L’ « hormone du bonheur » comme le dit Armelle. J’ai toujours imaginé le bonheur comme un jardin. Un sentiment qui se cultive et qui mérite toutes les attentions. « Où donc se trouve sa porte du bonheur ? » Parfois là, où l’on ne l’imagine pas. Il faut accepter de prendre des chemins de traverse, se tromper de route, changer de cap pour, enfin, trouver la bonne voie. Et quand on y est, le travail commence. Il faut le mériter, le cultiver, l’enjoliver, surprendre, donner, sourire et rire. Je ne sais plus qui l’a dit, mais pour moi « le bonheur est une oasis dans le désert »

    • Edmée dit :

      Oui, pour nous qui sommes prêts à en jouir, de ce bonheur de vivre, nous le rencontrons au détour parfois d’errances, dans la surprise émerveillée d’un beau cadeau qui s’offre à nous. Mais ceux qui n’en veulent pas, de ce pain qui « rend bête et vulnérable »… il n’est nulle part car ils le chassent.

  6. kakushiken dit :

    Merci pour ce texte qui me définit parfaitement…
    J’en ai les larmes aux yeux…
    Merci…
    (Une fois de plus je stoppe mon blog. Je suis perdu, égaré, découragé… Pardon de mon inconsistance.)

    • Edmée dit :

      Serais-tu celui qui ne veut pas le bonheur? J’espère que non… Ça doit être une longue solitude aussi, de ce côté-là de la porte…

      Tu nous reviendras, comme toujours, et nous te reviendrons aussi alors… il faut vivre son chagrin à fond, le « métaboliser » et reprendre les forces. Courage et amitiés 🙂

      • kakushiken dit :

        Est-ce que je ne veux pas le bonheur ? est une question que je me pose en non-stop. Qu’est-ce que le bonheur ? Avoir vécu dans une trame ou dès le départ ma mère essaie de me tuer a certainement perverti ma psyché… Le rejet d’une mère est le rejet du monde… Inconsciemment alors, j’ai sans doute traduit ceci comme un refus de vie… Dans la même idée donc, j’ai retourné la haine des autres contre moi…
        Cela expliquerait ma toxicité et le mal que je fais autour de moi, inconsciemment…
        Je ne sais… Mais je sais que je suis plus à l’aise dans l’agression que dans l’affection ou… l’amour.
        Oui, je reviendrais certainement… il me faut trouver une ligne de vie à suivre ; un fil d’ariane, pour ne pas me disperser, me perdre à nouveau…
        Si quelqu’un a des indices, je suis preneur

  7. gazou dit :

    On se représente bien le personnage que tu décris et on a mal pour lui

  8. Angedra dit :

    Refuser le bonheur est une « maladie » qui peut guérir ! J’en ai eu l’expérience. Il pensait qu’il n’avait pas le droit au bonheur. Son entourage se gardait bien de le contredire ! Cela était plus facile de le mener ainsi, puisqu’il acceptait de faire le bonheur des autres sans qu’on l’invite à le partager.
    Mais un jour le bonheur est arrivé par une porte dérobée et il a compris que le bonheur était à portée de sa main, de son coeur et non du côté des autres.
    Comme le dit Alain, pour moi aussi le bonheur est jardin… que l’on cultive ou que l’on laisse en friche.

    • Edmée dit :

      Oui… tu as raison, et l’histoire que tu racontes est bien belle… Cet homme a eu de la chance et l’a prise. Puis, comme toi et moi le faisons – et bien des autres! – il a cultivé son jardin… Et la vie lui sourit… Mais il a su se libérer ou s’affranchir des succubes 🙂

  9. celestine dit :

    L’humour, le rire, la joie…qui m’ont fuie un temps, reviennent à grands pas me souffler dans l’oreille que celui dont je pleure la perte est aussi celui qui m’a faite comme cela, avec le don du bonheur.
    J’ai envie de rire aux éclats pour lui rendre hommage de toutes mes fibres.
    Baci sorellita
    ¸¸.•*¨*• ☆

    • Edmée dit :

      Le temps du deuil n’est pas terminé mais bien celui de la stupeur en larmes. Les larmes reviendront et viendra même un temps où tu sentiras leur bienfait. Mais le besoin de rire remonte. Il te fait peut–être des guilis dans le ventre? Il te rappelle que tu aimes la vie. A la folie et au grand rire!

      Baci, très affectueux, sorellita!

  10. blogadrienne dit :

    j’ai vécu de mes 18 à mes 48 ans avec un homme comme ça, plusieurs de tes phrases le décrivent parfaitement, ses sourires étaient si rares et son incapacité à rire… incroyable.

    • Edmée dit :

      Moi aussi… pendant 15 ans. C’est très dur. Pour eux peut-être aussi mais en nous mariant, si nous acceptons de porter des fardeaux, personne ne nous parle de celui-là, que nous ne pourrons jamais poser (sauf en jouant les méchantes 🙂 )

  11. Florence dit :

    Un peu tard pour mettre mon com chère Edmée, mais hier j’ai eu plein d’ennuis avec mon ordi et en plus nous sommes allés nous balader un peu à Vertou au bord de la Sèvre. Donc pas pu mettre mon article et pas pu aller sur les blogs !
    Et oui, attendre un ptit quelque chose de l’autre… Il y a des gens froids et qui feraient mieux rester tout seuls que de pourrir la vie d’un autre. Il y a aussi des coincés qui n’arrivent pas à se laisser aller et qui devraient consulter un psy. Mais il peut se faire également, que l’autre ne convienne pas, que ses « bons mots » etc… ne fassent pas rire son partenaire. On peu parfois être attiré par une jolie frimousse, une belle allure… et être bien déçu par le reste. Mais là, il ne faut pas rester, car la vie devient vite intolérable, du moins je le pense, car cela ne m’est jamais arrivé. Pour moi, un être c’est un tout physique et caractère.
    Ce que tu décris est ce qu’on appelle ‘la solitude à deux » ! Il paraît que c’est la pire, et je veux bien le croire !
    Je te souhaite une belle fin de semaine avec ce beau temps qui repousse l’hiver et sa froidure (celle là non plus n’est pas drôle !)
    Bises bretonnes chère Edmée !
    Florence

    • Edmée dit :

      Comme on l’a dit bien souvent… « le mariage est une loterie ». C’est un peu simpliste mais ça a du vrai puisqu’on se marie, en principe, alors qu’on est encore en plein développement. De bonne foi on peut imaginer qu’on « aimera » rire avec l’autre, qu’on « aimera » faire des choses qu’on n’aime pas trop mais qu’on sent nécessaires au plaisir de l’autre. Et puis la vie prend le dessus, et le naturel revient au galop. Il faut faire les comptes.

      Bises liégeoises, Florence!

  12. Lauriza dit :

    Oui le mariage est une loterie. On croit connaître l’autre mais bien souvent l’amour rend aveugle et on ne veut pas voir que chasser le naturel il revient au galop. Alors on saute le pas et on s’aperçoit ensuite qu’il faut faire de nombreux compromis si on veut trouver un tant soit peu de bonheur. Celui ou celle qui a le don du bonheur trouvera toujours le moyen d’être heureux, en général ce sont des personnes qui se suffisent à elles-mêmes même en couple, tandis que les autres s’apercevront qu’ils ne peuvent pas vivre sans l’autre et c’est une grande solitude.

    • Edmée dit :

      Oui c’est bien comme tu le dis: ceux qui décident ne pas pouvoir vivre sans l’autre l’enchaîneront à eux, sans réaliser que la chaîne les entrave aussi… Ils sont seuls chacun à une extrémité, et souvent même haineux, désenchantés, ne rêvant que de la vie qu’ils auraient si seulement l’autre n’était pas là…

  13. Ravi de t’avoir revue quelques instants ce samedi à la Gare Centrale… Quelle coïncidence! Et pour rebondir sur ton article, ces quelques instants ont fait partie des petits bonheurs de ma journée, comme le fait de me balader sous le soleil dans Bruxelles, de retrouver des passionnés d’histoire qui ne comptent pas leurs heures pour organiser le cortège des 186 ans de la révolution belge, de prendre un verre entre amis dans ce beau café typique « La Mort Subite ». Merci la Vie.

    • Edmée dit :

      Oh que tu es gentil et toujours tellement enthousiaste! Tu souriais avec tant d’allant que tu m’as déconcertée, mais j’étais moi aussi très contente de te voir là, dans cette jolie gare, tous les deux après une magnifique journée… Je connais bien La mort subite que je « hantais » autrefois… Belle journée Petit Belge 🙂

  14. Colo dit :

    Quand je rencontre des personnes comme ça, je me demande toujours quelle a été leur enfance; les a-t-on fait rire? A-t-on ri, souri de leurs mots, leurs bêtises? Les a-t-on cajolés?
    J’ai la chance d’avoir un « heureux caractère » comme on dit, de rire facilement, je remarque que mes frères et sœurs aussi…
    Merci Edmée!

    • Edmée dit :

      Chaque histoire est un mystère. Chez moi aussi on riait beaucoup, et forcément ça teinte la vie. Je m’entends tout de suite avec les gens qui rient volontiers. Mais sans « rire », il y a des gens qui expriment leur plaisir d’être en notre compagnie d’autres manières… Des manières que l’on apprend à apprécier, et reconnaître : la tendresse, quelques attentions, un peu de prévenances…

      Quand il n’y a que le silence des gestes, du coeur, de l’énergie vitale… que ce soit leur faute ou non, ça nous fait affreusement mal!

  15. Nicole Giroud dit :

    Comme ce texte est poignant! J’avoue que je me sens honteuse de ne pas connaître ce sentiment de solitude, je vis avec un homme merveilleux depuis plus de quarante ans. Nous nous regardons souvent, du bonheur plein les yeux: »Ce qu’on est bien! »
    Je souhaite à chacune et chacun d’entre vous de connaître cette plénitude.

  16. Françoise dit :

    Ce qui m’a charmée chez mon mari, lorsque je l’ai rencontré, c’est qu’il était vivant, il aimait danser, rire, chanter, alors que chez moi, c’était silence et retenue. Nos caractères si différents ont déteint l’un sur l’autre, à lui, lui apportant un peu de réserve, et à moi, m’apportant un peu de sa joie de vivre ! 🙂
    Belle fin de dimanche, Edmée.

    • Edmée dit :

      C’est l’idéal: chacun donne un peu de ses vertus à l’autre quand elles sont nécessaires. Retenue ici, joie primesautière là. Et ça donne le plus à la vie à deux! Bravo!

  17. Margaret de Brouwer dit :

    Beau!

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