Une chance de cocu pendu

Si comme on le recommande souvent aux USA, je « count my blessings » (fais le compte de mes bénédictions), je n’en vois pas la fin, de ces bénédictions.

Je suis née dans le confort, de parents gentils et imparfaits, mais bons, raisonnables, aimants.

Je n’ai jamais manqué de rien d’essentiel, je n’ai connu aucune guerre telle qu’on la conçoit (certes… des périodes difficiles à cause des élucubrations mensongères des bandits qui gouvernent ici et ailleurs, je sais ce que c’est comme tout le monde, mais je les vis à l’abri). J’ai pu voyager, étudier, faire la plupart de mes choix en toute liberté (un peu parce que je ne suis pas très obéissante en général et un peu parce que, quoi qu’on en dise, je vis dans un coin du monde où on offre beaucoup de libertés).

J’ai connu un peu de faim, de précarité et de boulots franchement nuls, mais rien d’insurmontable, et j’avoue que je savais qu’il suffisait de demander à mes parents, ils m’auraient aidée. Je ne demandais pas et ai donc soupesé mes propres forces mais sans l’angoisse de devoir recourir à des « expédients indicibles » si les choses tournaient mal. On ne m’a jamais enlevée, menacée, arrachée aux miens pour les effacer de ma vie. Les violences que j’ai vécues, je les ai surmontées et en comparaison de ces pauvres êtres de tous sexes et âges qui sont broyés par des engrenages divers activés pas des monstres divers eux aussi, c’était peu de chose.

Ce sont des chances exceptionnelles.

Tant de gens n’ont évidemment rien demandé mais hélas sont nés dans les bombardements, massacres et viols, sans aucune garantie de lendemains qui chantent ou simplement se taisent au profit de gazouillis et ronronnements. Tant d’enfants jamais voulus ont dû grandir avec cette faute : tu as gâché ma vie, arrange-toi avec la tienne. Tant de vies humaines traitées comme de la marchandise : marchandise sexuelle, esclaves invisibles, banque d’organes, marchandise sacrificielle sur l’autel de la « science », d’un quelconque démon, d’une folie qui bave dans le noir jusqu’à avoir sa proie.

Plus « ce qui se passe ailleurs » monte à la surface et devient accessible, et plus on réalise que rendre grâce à Dieu ou à une bonne fée la marraine, ou à une étoile luisant de bonté pure n’est pas du mumbo jumbo, mais devrait faire partie de notre vie comme le réveil paresseux, l’appétit, les soins de peau et santé que l’on se procure avec amour.

J’ai eu la grande chance d’avoir mes parents longtemps, assez pour découvrir en eux la personne au-delà du parent ; j’ai des frères et sœurs fantastiques ; j’ai des amitiés loyales ; j’ai vécu ici et là (et puis là et ici) et ai compris ce qui se comprend dans ces circonstances ; je ne suis sujette ni à l’envie ni à la vénalité ni à la méchanceté (bon, j’ai été chipie parfois, et, pour alourdir mon cas, c’était même avec une joie un peu indécente, mais loin de la vraie méchanceté) ; je ne suis pas menteuse non plus (même si bien entendu j’ai dit quelques pieux mensonges au cours du chemin). Et n’ayant pas ces vilains défauts, j’en ai évité les tourments, je n’ai même pas dû lutter (c’est, à ce point, une chance de pendue, je dois peut-être le reconnaître !).

Très très reconnaissante envers mon destin, je ne peux le nier…

De là à dire que j’irai au ciel, si c’est pour finir à la droite de Jésus et prier tout le temps, je n’y tiens pas, et j’espère pour lui qu’Il n’a plus ce genre d’illusion à mon sujet.

À mon avis Il est assez subtil pour ne pas avoir cru plus que moi à ces sornettes…

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Le droit à l’envers et à l’endroit

J’ai lu il y a peu qu’un restaurateur belge avait refusé l’entrée de son établissement à des clients se présentant en tenue de jogging. Il ne veut pas non plus d’autres tenues sportives, ni de singlets. Et le public, en grande partie, de s’indigner : « on a le droit de s’habiller comme on veut ! Pour qui se prend-t-il ? »

Cette nouvelle arrogance des gens qui auraient tous les droits, tandis que les autres n’ont pas celui de s’y opposer !

Il y a aussi eu une femme tellement tatouée que de méchants – et retardés mentaux – personnages lui avaient demandé de ne plus venir chercher ses enfants à l’école, car elle effrayait les autres. Elle trouvait aussi trop injuste, cette Calimero Graffiti, que la recherche de travail soit pratiquement mission impossible à cause d’autres retardés mentaux aux idées étriquées qui non, ne la voulaient ni comme serveuse ni comme réceptionniste ou caissière. Ces mesquins voulaient sauver leur business et la forçaient à rester sans emploi. Si c’est pas peu charitable, tout ça !

On a sans doute le droit de prendre le droit. Mais pas celui d’enlever le droit des autres. Il y a des restaurants et des cantines sportives. La sueur et une tenue Décathlon, OK si on le veut et où on le peut, car si on préfère nappe et fleurs sur la table plutôt que sets de papier et pots de moutarde enlacés à Ketchup et mayonnaise, on apprécie aussi un peu d’élégance ou, au minimum, d’éducation.

La dame tatouée, ma foi, si elle se trouve à croquer, je n’ai rien à redire, aucune loi n’interdit les lèvres comme des enseignes en forme de doughnut, les cheveux verts, les fesses renforcées, les piercings et tatouages. Ils ont donc le droit, oui. Mais qu’en est-il du droit des autres, à ne pas se sentir à l’aise, à trouver ça laid, indécent dans certains cas. Tout comme on aime le poulet plus que le porc, ou qu’on ne supporte pas le tofu ou les pâtes aux grillons, on peut parfaitement – on a le droit – refuser une fausse maori en technicolor comme secrétaire. Au nom du tout le monde a le droit au travail j’ai par exemple eu cette expérience hors du commun :

Un serveur dans un sympa petit fast food, bien gras et dodu, velu comme une peau d’ours, qui se délectait à remplir les plateaux de sandwiches avec un jeans taille basse, d’où vue stupéfiante sur un généreux « décolleté » constellé de touffes de poils et un morceau de string. Merci, je suis retournée là depuis que je ne l’y vois plus, car s’il a eu du travail, le pauvre l’a perdu. Je me souviens qu’aux USA un monsieur adorable tenait un magasin de CD et DVD players, auto radios etc. Il avait donné sa chance à un petit jeune très doué, qui n’a rien eu de mieux à faire de ses salaires que de … devenir un vampire. Il s’est fait greffer de longues canines, tatouer le blanc des yeux en noir, truffer de piercings et enluminer de tatouages divers. Je pense que personne ne s’étonnera du fait que la clientèle fuyait à toutes jambes, et que notre Draculon s’est retrouvé au chômage.  

On a droit, si on voit les choses comme ça. Mais en face de vous, il y a aussi les droits des autres, et il faut bien en tenir compte.

Pourquoi ces gens qui revendiquent le droit de narguer les autres avec leur « originalité » ou leur sans-gêne ne comprennent-ils pas qu’ils sont leurs pires ennemis, et se condamnent eux-mêmes ? Il n’y a personne dans leur entourage pour leur parler ?

Où sont passées les bonnes punitions d’antan ?

Dire non n’est pas agressif…

Je n’ose penser aux stars, aux personnes dont on chasse la tête à encadrer dans un selfie aux sourires panaméricains, à celles qui ouvrent des portes ou qui aiment leur sillage de fans fidèles et flagorneurs à traiter comme des animaux de dressage, leur donnant des susucres-sourires.

Car il y a des obstinés (et obstinées) qui veulent absolument, mais absolument, être mes amis et amies. Je ne parle pas des brouteurs, là on est tous fidèlement suivis par un nuage de poussière provoqué par leurs petits pieds dans le sable. Je parle de gens « normaux » (enfin…). Souvent d’autres auteurs mais pas que. On sait que pour certains, il s’agit d’offrir à leur propre splendide échantillonnage de talent un nouvel étalage, séduire les amis de leurs « amis ». Mais ce n’est pas toujours le cas, il me semble. Je ne suis pas fascinante, je ne suis pas quelqu’un dont on parle, je ne suis que moi (ça me suffit, c’est déjà difficile à gérer…). Et pourtant, à ma grande surprise, ma réserve a été vue par certains et certaines comme un soufflet impardonnable.

Il faut dire que je me suis parfois trouvée confrontée à la méthode bulldozer, après le ronronnement du début c’était le gros ouvrage, les photos personnelles en MP, l’histoire de la famille, les invitations à passer quelques heures ensemble. Je parle de gens que je ne connaissais pas, ou que j’avais rencontrés très anonymement quelque part. Je parle de gens à qui j’ai répondu par politesse et sans effort, pour ensuite devoir hérisser les piquants de porc épic de plus en plus haut, retrousser les babines, un peu baver, grogner, et m’en aller sans les avoir mis en pièce, ce qui était déjà magnanime de ma part.

Et j’apprends que je suis snob, pimbêche, que « je me crois », que je n’ai pas de cœur etc. Honnêtement,  c’est triste pour ces personnes de se sentir rejetées alors qu’elles ont été insistantes et n’ont pas respecté mes limites ou mon timing. Je n’ai pas besoin de nouveaux amis, de nouveaux contacts, et je connais le luxe délicieux de laisser venir à moi non pas les petits enfants mais les gens aimables et joyeux.

Terreur à la carte

Je me souviens du “choc culturel” ressenti en arrivant aux USA. Plutôt, en y mettant racine, moment où on « se rend compte » de la réalité quotidienne. A la télévision, c’était le pain quotidien de terreur : documentaires sur des serial killers connus, leçons de survie (genre les recettes de grandma, mais là c’était plus musclé) où on vous donnait des trucs simples et efficaces pour résister à un home jacking (par exemple, pour avoir un enfant sain, dynamique, responsable et bien préparé genre viking au combat, il dormait avec une corde à nœuds et une lampe de poche sous le lit, prêt à sauter par la fenêtre pour aller chercher des secours dans la nuit – froide et neigeuse si possible – en suivant un itinéraire qu’on lui faisait parcourir régulièrement au triple galop ; quant au reste de la famille, chacun avait son rôle délicat qu’il répétait mensuellement aussi, pour ne louper aucune étape une fois le grand jour venu…), à un car jacking (même genre de répétitions). Que la possibilité que ça leur arrive était pratiquement nulle, ça ne les effleurait pas, et ainsi l’angoisse se revivait à chaque répétition générale, à l’idée que Kevin, tu dois descendre plus vite le long de ta corde, et ne pas écraser la plate-bande, et quant à toi, darling, tu dois changer de pantoufles car celles-ci glissent sur le carrelage, je ne veux pas avoir à te ramasser en plus de tenir les intrus en respect…

Une de mes amies me racontait comment, lors de la célébrissime époque de la Baie des cochons, à l’école on leur faisait un entrainement à la guerre, hop sous les pupitres, hop on court dans les caves, bravo les enfants mais pas toi Dorinda-Lee, tu as encore demandé à Brendan de t’aider à courir, tu dois mieux t’entrainer à la gym…

Tout le monde se souviendra du Y2K, l’apocalypse de la fin de millénaire, annoncée jusqu’à plus soif. Des mois à l’avance, la presse (notre distributeur de grandes vérités pour notre bien) détaillait les possibilités atroces en vue : tous les ordinateurs du monde allaient s’arrêter à minuit car leurs dates n’étaient pas prévues au-delà de 1999. Aucun « savant » n’avait pensé que peut-être le monde continuerait après ça, pas même chez Apple dans les modèles 1999. Non. On était foutus. Car tous les systèmes de sécurité, d’éclairage, de monitoring etc… allaient finir en feu d’artifice. Un chaos de film d’horreur. Au travail on me téléphonait pour me proposer, à un prix vraiment fantastique, d’acheter je ne sais quoi qui prolongerait la survie de mon ordi – il fallait toutefois que moi je survive à l’effondrement de tout le reste, mais en tout cas mon ordi serait tout fier et tout vivant – et je demandais au télévendeur s’il avait le cerveau complètement formé pour en être réduit à ça…

Le personnel des hôpitaux et des entrepôts militaires volait les masques pour les revendre (si jamais ils survivaient, ils seraient riches, ça donnait tout de suite un objectif stimulant) car bien entendu, les conduites de gaz allaient sauter, ainsi que tout ce qui était toxique sur la terre.

Les rayons des supermarchés se vidaient, il semblait que les candidats à la survie considéraient que le plus excitant serait d’avoir du sucre en quantité car plus de sucre en vue, tant pis pour les autres bien entendu.

Mon amie, toujours elle, rodée à cette culture, se désespérait : son voisin infirmier lui avait dit qu’il n’y avait plus de masques volés à revendre. Mais elle avait entendu dire qu’il fallait acheter du scotch tape en quantité pour bien isoler portes et fenêtres, afin que les nuages mortels restent au dehors, et aussi pour réparer une vitre brisée par les explosions en tous genres qui ne manqueraient pas. Elle avait des montagnes de sucre, de biscottes, de papier de toilette, de café, un camping gaz, des lampes de poche. Mais elle angoissait : s’il lui manquait quelque chose ?

Moi j’avais acheté un surplus de bougies… Rien d’autre. Je n’avais pas peur, pas par héroïsme mais je ne croyais à rien du tout de ce scenario ridicule. Elle était inquiète pour moi, gentille amie sincère. Je la faisais rire en lui disant « s’il te manque quelque chose, tu prends un marteau et tu vas le demander aux voisins, les menaçant de casser leurs vitres s‘ils refusent ». On riait quand même, moi vraiment, et elle parce qu’elle en avait bien besoin. Et puis le « réveillon » approchait, le dernier peut-être. Elle n’avait pas la tête à fêter la fin du monde. Et je lui ai dit : « regarde à la TV le passage au nouveau millénaire en Australie : si ça pète, tu auras encore le temps de courir dans ta cave, sinon prépare le champagne ».

Ma Lovely Brunette et moi nous sommes fait nos vœux par téléphone, je lui ai demandé si elle avait pris des précautions… « oh oui, j’ai acheté une bougie ».

La terreur à la carte a débarqué ici.

Il faut raison garder !

Un loup dans l’armoire

Il fut un temps où porter une fourrure était à la fois signe de statut social et… d’élégance. Alors on ne savait pas que des animaux étaient en voie de disparition, et il ne serait venu à personne d’imaginer un animal dénudé de sa pelisse, la peau dégoulinant de sang, tout ça pour la « vanité d’une riche bitch ». 

Bien des époques furent, et qui revisitées de nos jours par des auto-proclamés juges moralisateurs qui ne raisonnent qu’avec une étroitesse d’esprit stupéfiante, sont devenues le témoignage évident de la bassesse crasse du genre humain. Heureusement, soyons rassurés, les redresseurs et redresseuses de tort d’aujourd’hui font mieux dans tous les domaines. 

Je n’explorerai pas ces domaines et m’en reviens à mon loup dans l’armoire…

Lovely Brunette avait été la petite chérie de « Bonne », sa grand-mère Justine, plus séduite par une petite-fille cajoleuse que par ses deux petit-fils. Je la comprends (et je ne dirai pas pourquoi, si la curiosité vous titille il vous faudra la dompter, car je ne veux pas finir mon existence en duels et joutes de style présidentielles). Bref, Bonne était l’incarnation de la délicieuse mère-grand. Je l’ai encore « connue » (si on peut dire…) et ai un très vague souvenir d’elle me faisant osciller sur ses genoux.

Lorsque Bonne est décédée, Lovely Brunette a repris « le Saint Bonhomme » déjà évoqué, qui se trouvait en bas de l’escalier grand maternel, et … son loup. Un grand manteau de loup noir de Russie (que personne ne me dénonce, surtout !), aux longs poils. Il était déjà démodé depuis belle lurette, et perdait ses poils comme un grand chien fou pas peigné. On l’avait remisé dans une grande armoire d’acajou du grand grenier, où il se pelait année après année dans la paix de l’obscurité. Il y était en guerrière compagnie car nous avions encore des munitions et grenades entreposées dans les tiroirs inférieurs, comme bien des voisins je pense. Parfois je le mettais, il trainait jusqu’au plancher, et je m’imaginais non pas en riche douairière mais en loup aux yeux jaunes, ne craignant ni la neige ni le blizzard, roi des forêts,  furtif et implacable…

Je ne sais pas du tout ce que sont devenus le loup et l’arsenal, mais je peux vous dire une chose : ce pauvre loup aurait certes mérité de finir sa vie de loup avec toute la grandeur et l’appétit qu’on imagine, mais à ma façon, je lui ai rendu hommage  bien des fois. J’espère qu’il m’en sera reconnaissant le jour où, si un jour, qui sait…

The Turning Point

L’instant qui libère ce quelque chose qui va nous compléter, mettre la touche finale…

Dans la belle et récente interview de notre Reine Paola de Belgique, elle dit une petite chose si simple et par conséquent, bien grande : quand on accepte ce qu’on doit faire, on devient libre. 

On résiste souvent à des choses, on est fidèles à des « principes » par habitude ou fausse conviction. On ne veut pas se marier, vivre en couple, vivre seul, avoir un travail fixe, des enfants, vivre dans un autre pays, se plier à d’autres disciplines (ou des disciplines tout court…). On ne pense vraiment. Qu’on n’est pas « faits » pour ça. On sait que ça n’est pas nous…

Et puis il y a le déclic qu’on n’a pas vu venir. 

On rencontre quelqu’un que l’on a du plaisir à aimer ; on entre dans un groupe aux pensées neuves pour nous, et à notre surprise on s’y sent bercé et heureux ; on a un enfant (celui qu’on ne voulait surtout pas avoir car on n’était pas taillé pour ça…) et une chaudière d’amour s’allume et on y jette tous les encombrants mentaux parasites ; une personne aimée meurt et le déséquilibre provoqué par sa perte nous fait nous appuyer là où nous n’avons jamais vu autre chose que de l’inutile… ; on est un jour fouetté à en perdre le souffle par la certitude que la personne qui nous met mille fois à l’épreuve de notre amour pour elle n’en éprouve aucun, et envisager de vivre sans elle devient la lueur dans la nuit au lieu de la nuit éternelle… ; on « rencontre » une occupation professionnelle qui nous étonne : c’est tout à fait ce qui nous convient.

Alors on accepte ce qu’on doit faire, et on est libre. On jette du lest et on déploie les ailes. On a touché le ciel du doigt, et on n’en oubliera jamais la bénédiction….

Oui c’est bien ça : comme une petite famille

Le monde merveilleux des auteurs, des auteures.

Une vraie famille dysfonctionnelle, avec les pères fouettards, les mères aux mœurs douteuses, les sœurs indignes, les braves silencieux qui s’occupent de leurs affaires cachés dans le grenier, les fêtes entre membres de la famille (mais qu’elle est grande, grande, la famille…) se retrouvant lors du concours annuel des prix, coupes, reconnaissances, connaissances, fourberies de l’année écoulée. Et la litanie des mensonges « on m’a demandé de publier chez *** mais tu penses bien, j’ai refusé » ; « mes proches se demandent comment je fais pour vivre de mes droits d’auteur, et je vois bien que certains ne me croient pas » ; « à compte d’auteur ? certainement pas, jamais ! Pas pour moi ! Ils font à compte d’auteur pour les autres, mais moi, j’ai eu un contrat spécial » ; « pour écrire cette magnifique romance se déroulant dans les tranchées, j’ai fait de sérieuses recherches, avec pelle et lampe de poche » ; « j’écris plus vite que mon ombre, mon mari ne me voit pas pendant des mois » ; « on m’avait retenu pour le prix *** mais c’est un pistonné qui l’a eu à ma place »…

Un monde très égocentrique, fait de flagorneries et d’esprit marketing le plus souvent. Certains font leur promotion comme s’ils vendaient des pommes de terre : une bouteille de bière à l’achat de trois livres, un signet avec ma photo très décolletée et dédicacée, un bol tibétain à -15% à l’achat de Mes secrets de zénitude…

Un monde de pistons stupides aussi, où des associations « littéraires » organisent des concours dont le prix est déjà décerné en secret mais le montant des inscriptions remplira la caisse et fera croire à l’honnêteté de la chose ; où des échevins communaux créent des rencontres littéraires où on verra défiler leur nièce, leur fille, le fils de la femme de ménage, le fiancé de leur filleule avec un premier (souvent dernier aussi) livre qui laisse sans voix (c’est souvent vrai…). Où des organismes culturels perdent les manuscrits soumis au concours (dont, on s’en souvient, le gagnant est déjà désigné à l’avance) comme ça m’est arrivé il y a des années : mon manuscrit ayant été perdu dans l’éther la première année, la seconde j’ai chargé une amie sur place de le déposer dans la boite aux lettres. Il n’est jamais arrivé non plus, même pas pris en compte. A mon étonnement ingénu, j’ai eu droit à « entre la boite aux lettres et le 4è étage, il peut se passer beaucoup de choses ».

Des auteurs remarquables ne se remarqueront jamais, leur voix assourdie par le brouhaha de compliments doux comme l’huile essentielle de ciguë que s’échangent ceux qui ne lâchent pas la scène. Oh quel bonheur de vous revoir à ce salon, faisons un selfie ensemble pour montrer à quel point nous nous entendons (quel chemisier minable, entre nous soit dit…) ; Oh mon Dieu je ne crois pas à ma chance d’être assis/e à côté de vous cette fois encore, faisons un selfie pour témoigner notre belle entente (et pousse-toi de là avec tes livres idiots, que j’aie de la place pour les miens…) ; Mais c’est pas possiiiiiiiible ! Vous, à nouveau ! Je viens de faire un selfie avec Amélie, vous l’avez vue ? Faisons-en un nous aussi (et certes qu’Amélie ne vous aurait même pas remarqué, vous !)…

Des auteurs remarqués prennent la parole, les écrans, les selfies, les articles, souvent aussi les prix. Certains, soyons justes, le méritent. Et ne deviennent pas toujours insupportables une fois habitués au frisson de la célébrité. Mais certains se prennent pour des « écrivains » avec un talent de premier en rédaction en 6è primaire (améliorer l’orthographe, a rappelé la maîtresse…).

Finalement, c’est un monde comme tous les autres, une grande famille où peu s’entendent, se soutiennent, s’épaulent. J’ai pris mes distance avec beaucoup de ces égos terrifiants, même si, je le redis, j’en ai connus qui ont du talent, et mériteraient mieux que leurs propres louanges ou celles d’un fan club qui n’attend qu’une chose : les mettre en pièces à l’arrivée d’un autre Alpha plus vantard, même si moins qualifié.

J’ai rencontré des lecteurs/lectrices et des auteurs à l’humanité généreuse et sans flagornerie. C’est une délicieuse récompense, simple, tranquille. De vraies amitiés, ou des sympathies fortes, se sont créées, sans jalousie, sans inquiétude. Juste la bienveillance et le plaisir pour l’autre. Notre plaisir premier, c’est d’écrire. Ensuite, de plaire à qui nous lit. Pour le reste, les louanges et compliments, s’ils font plaisir (et pas toujours, quand on s’attend à voir serpents et crapauds jaillir de la bouche de qui les prononce…), sont chose d’un moment. On peut d’ailleurs écrire quelque chose d’époustouflant, et puis faire un coup ou deux dans l’eau, qui ne méritent plus que l’on batte le tambour. On écrit avec ce qu’on est et ce qu’on a. Une année n’est pas l’autre, comme pour le vin…

Preuve qu’on n’écrit pas avec des logarithmes incorporés…

Le style du pas-de-style

Depuis que je suis la fée (Clochette) de mon propre logis – et ça remonte à 1972! – mes coups de baguette magique s’abattent sans uniformité sur le décor. Je mélange tout. Je recycle beaucoup. Des rideaux ont été autrefois promus en recouvrement de sofa et chemise d’homme ; une étagère métallique a, pendant des années, séparé mon lit du reste d’un studio, sauvagement envahie de des plantes qui exprimaient leur joie de vivre au demi-mètre de foisonnement ; de vieilles gravures anglaises au chic ancien ont flirté avec des batiks indiens ; le tabouret de bobonne aux pieds de lion a fait face à deux fauteuils indonésiens en rotin sur lesquels je veillais à ce qu’un copain un peu trop replet ne s’asseye jamais sous faute de les réduire en allumettes. Il avait droit au futon au ras du sol qui lui donnait trois têtes de moins que tout le monde. Et mal au dos sans doute.

Aux Etats-Unis, je n’ai jamais trouvé de mobilier qui me plaise, sauf le divan et le fauteuil italiens, massacrés par le chien qui les aimait beaucoup aussi, aidé dans son oeuvre de destructrion par les chats. Alors je ne me suis pas occupée de style mais d’avoir des choses qui me ressemblaient autant que possible (avec French accent, pas intéressé au bingo du samedi soir, mangeant des abats et regardant des Foreign movies comme les intellos New Yorkais), et le vieux et moche bureau oublié par les anciens propriétaires s’est vu corrigé en on ne sait trop quoi de coloré et déconcertant que tout le monde m’admirait au cri de « how wonderful!!!! ».

Parce que voilà… j’habite toujours dans un chez moi qui ne ressemble au chez moi de personne d’autre. Je ne le fais pas exprès, pourtant. Et je ne « décore » pas,  je regarde et garde les objets que j’aime. Qu’ils soient de décennies ou continents différents ou pas. Précieux – en ce qui concerne la valeur – ou pas.

Et je comprends maintenant la réflexion de ma mère la désormais célèbre Lovely Brunette, devant ma chambre de jeune fille qui déjà – avec la table de nuit japonaise, les photos de Brigitte Bardot au plafond, le crucifix au-dessus du lit, un dessin aux teintes vives que j’avais fait et qui représentait l’arrière de la maison, le tapis rongé par les mites affamées, et un vieux voile de dentelle noire sur l’abat-jour parce que j’avais lu que c’était très mode – annonçait que je mélangerais tout, me disait « mais quel bazar ! ».

2016-03-30 09.12.19Bref,  ce n’est pas la maison de Marie-Claire mais celle de Shéhérazade.

Mon logis n’est pas là pour prouver au monde que j’ai bon goût, mais en revanche je dois y bien vivre, y voir les objets que j’aime et qui me parlent de ceux que j’aime ou ai aimés (et aime encore), me confirment que c’est chez moi, pas impersonnel, rien à voir avec cette ennuyeuse maison de Marie-Claire, laquelle doit piquer une crise si on veut changer une potiche et un album sur des collections de vases tiffany de place ou si on a tout fichu en l’air dans son équilibre parfait entre tableaux, espaces et objets (en fait Marie-Claire trouve qu’on devrait tout acheter parce que c’est preuve de style et de classe mais ensuite on doit tout ranger dans les soupentes pour ne pas surcharger…).

Mon logis n’est pas un musée mais, oui, mon bazar de vie. Et non, on ne s’y ennuie pas et Marie-Claire n’a rien à dire. Chez elle je n’oserais pas m’asseoir de peur de faire une bosse dans le coussin, et je m’en voudrais de l’avoir fait s’évanouir en émiettant – accidentellement – un chips sur son tapis rarissime.

Et puis… trop de prudence est un manque de goût. Marie-Claire calcule tout, et fait en sorte « de ne pas se tromper »… ce n’est pas du goût, ça!

 

 

Les envieux en habit – chatoyant – de scène

Combien de comédiens, natural born liars, ne connaissons-nous pas ? Ces gens qui à peine endossent-ils l’habit de scène et s’arrêtent-ils sous les projecteurs, dès l’enfance parfois, ne quittent jamais les planches, se condamnant à n’être aimés que pour qui ils font semblant d’être et pas pour qui ils sont ?

La petite gentille dont les yeux angéliques pèsent déjà tout le mal qu’elle pourra faire ; le petit qu’a-peur-de-rien et qui n’attend qu’une chose : qu’on le supplie de ne pas sauter de 5 mètres, de ne pas plonger du haut du rocher, de ne pas aller casser la figure au gros de la classe ; le faux zélé, roi de la délation, qu’on ne soupçonne donc jamais de faire ce qu’il pointe du doigt …

J’en connais beaucoup finalement, et plus le rôle a pris de l’importance, plus la personne est malheureuse. Et plus elle est malheureuse et plus elle est envieuse. Et plus elle est envieuse plus elle est peu à peu mise à l’écart par les spectateurs ou co-acteurs qui ont fini par comprendre qu’ils ne savent pas en face de qui ils sont vraiment.

Et elle nuit, cette personne envieuse et malheureuse, puisqu’elle vit la vie d’une autre, imaginaire et idéale, à laquelle elle sait ne pas ressembler. Hélas. Alors que les autres, eux, ont tant de chance ! Quelle injustice… Et elle envie, donc…

Elle voudrait la vie d’un ou d’une autre. Elle imite cet autre. Elle s’imprègne de ses gestes, son style, ses intonations; elle fait, fidèlement, les mêmes activités ou vacances qu’elle; elle cherche à entrer dans le cercle des intimes de cet autre, pour les intéresser aussi.

La femme seule et ravie de l’être, avec ses copines hyper actives et son agenda débordant, mais qui se transforme en oracle funeste quand une de ses amies fuit le groupe pour un amour qu’on n’attendait plus. Elle se donne bien du mal pour faire sombrer l’affaire afin de démontrer que voilà… on est tellement, mais tellement mieux sans homme, sans l’illusion d’un amour à servitudes qui bientôt ne sera plus que servitude. Comme elle. Tiens, buvons un coup aux illusions perdues et oublions cette romance ridicule.

L’homme qui a « réussi son mariage » comme s’il s’agissait d’un concours d’entrée dans la classe supérieure, c à d qu’on ne l’a pas largué, ce qui n’est pas tout à fait signe d’entente conjugale mais… bon, c’est un autre sujet passionnant que celui-ci ! Il donne des conseils aux autres, pérore sur leur devoir d’endurance et de compassion, sans expliquer que lui, s’il tient le coup, c’est parce que de sa femme, il s’en fiche, et qu’il la trompe depuis toujours.

Le boute-en-train de service, toujours le mot pour rire, l’attitude je-m’en-foutiste en racontant les anicroches de la vie quotidienne, de simples péripéties si on y pense, n’est-ce pas ? On se l’arrache car son insouciance fait plaisir à voir, sauf à ses proches qui le voient passer de Jean-qui-rit à Jean-qui-pleure en refranchissant le seuil de sa maison, jaloux, envieux de ce couple de parvenus à qui tout sourit…

La psychiatre née, détachée, distante, à l’abri de la vie derrière une sérénité assez bien imitée, souriant avec indulgence aux remous des autres vies, conseillant ce qu’elle n’a jamais besoin d’appliquer puisqu’elle, elle ne vit pas. Elle ne dort pas, d’ailleurs, ne digère pas, n’aime pas, et se plaint des « autres » ou des « gens », dont elle ne fait pas partie, car ce n’est pas elle qui…

Ça vient dans tous les modèles et toutes les couleurs, tous les âges et tous les sexes, y-compris celui des anges. C’est souvent insomniaque, ne peut plus manger ceci ou cela, ne supporte pas un tas de choses – petit appel du pied discret à une compassion admirative pour quelqu’un qui affronte aussi noblement ses épines dans le pied en question.

Ils nuisent, ils envient, ils usent. Oiseaux de mauvaise augure « pour ton bien », leur habit de scène tissé de fibres toxiques dont le brillant se ternit avec les ans leur colle à la peau. L’enlever serait se mettre à nu, révélant les rougeurs et plaies.

Finalement, heureux les figurants, qui traversent la scène dans leurs propres habits, insignifiants dans la pièce mais tellement bien dans leur petite peau fleurant bon le Palmolive…

 

Que fais-tu comme études ?

Je me souviens de cette phrase « entrée en matière » qui permettait de se parler entre garçons et filles sans sembler futile, superficielle, cruche ou benêt. En général, la réponse nous intéressait vraiment peu (moi, en tout cas, ça me barbait pour tout dire…), mais permettait au garçon de pérorer d’un air assuré sur ce qu’il étudiait, voulait faire, devenir, et il devenait en tout cas principalement rasoir, car lui non plus n’avait pas de réelle conversation, et à cette époque que mai 68 n’avait fait qu’effleurer dans nos provinces, tout badinage profane était risqué. Sulfureux. Attention à ne pas se faire compromettre, donc éviter les compliments ou les quand tu sors, tu vas où ? Donc le malheureux s’emballait sur ce terrain sans embûches qui le mettait en valeur, démontrait qu’il était un bon garçon bien élevé marchant au pas. La jeune fille était supposée béer d’admiration et tenue de tout mémoriser, car bientôt, maman lui demanderait ce que comptait faire, « dans la vie » ce jeune homme avec qui elle avait dansé au moins deux fois, la maman de la petite machin-chose aussi présente le lui avait dit chez le coiffeur et on le décrivait comme un bon parti.

Il fallait danser et parler avec des valeurs sûres. Quand je dis parler, c’était se taire, écouter, et, quand on nous le demanderait, dire comme si ça ne comptait pas, qu’on faisait Arts Déco par exemple. Ce qui était mon cas. Un passe-temps avant d’avoir attrapé un mari (au lasso, au charme, au chantage… comme il vous plaira). Un diplôme à mettre au tiroir dès le mariage, pas le tiroir des livres de recettes quand même, mais peut-être celui avec le certificat de baptême et de communion. J’ai parfois eu mon interro privée, par un pédant dans les bras duquel je dansais, aaaaaaah que pensez-vous de James Ensoooooor ?

C’était horrible.

À l’alliée blogueuse qui m’a si gentiment offert « La femme gelée » d’Annie Ernaux, je dois d’en être certaine à présent : je n’étais pas la seule jeune fille monstrueuse en circulation, qui trouvait le parcours imposé aussi réjouissant qu’une longue agonie sous le regard satisfait d’une famille agrandie et vigilante.

Je savais que mon « salut » – c à d quitter la case jeune fille oisive et inutile pour me placer sur la case jeune épousée dédiée à la progression spectaculaire de l’époux – ne m’arriverait que par une demande en mariage, et que je ne ferais que changer de case et de cage : j’allais quitter celle régentée par mon clan pour entrer dans celle sur laquelle régnerait un « boutons-lunettes » comme les appelait Lovely Brunette, un jeune homme pâle avec des cheveux plats (et gras, tant qu’on y est…), au visage piqueté d’acné, avec des lunettes à monture Woody Allen. Ou alors le jeune play-boy en vogue, un peu décoiffé (avec art), bronzé à Chamonix ou sur l’île de Ré, le pull en shetland jeté sur les épaules, me regardant avec un abominable « t’en as de la chance, toi, de m’avoir épousé moi, le jeune Trucmuche plein aux as et si beau gosse qui n’avait que l’embarras du choix » déformant le sourire. Je n’avais envie ni de bouton-lunettes ni du jeune Trucmuche, ni de devoir appeler sa mère maman, de faire ses recettes à elle – toujours un peu moins réussies, ça va de soi -, d’avoir une belle-sœur moche ou prétentieuse, voire deux, de recevoir les perles de Mme Trucmuche mère pour mon premier rejeton mâle.

Je n’avais pas envie de parler de mes études, qui n’étaient que mes études, et pas une passion folle. Je n’avais pas de passions folles à cet âge, à part peut-être le tube de l’été et la tarte au sucre. J’avais besoin de m’intéresser à l’esprit d’un garçon, d’en être attirée le cas échéant, de rire éperdument avec lui, de sottises de préférence, et pas de m’ennuyer à l’entendre de me dire sur l’autoroute « et tu te souviens de comment on appelle ce passage ? Non ? Une trouée, je te l’ai déjà dit cent fois, une trouée ! » (dixit le prétendant architecte) ou une clause de droit civil (le comptable).

Oh, pour changer de case, je l’ai fait, j’ai dû faire le tour de l’échiquier et recommencer. Les cages, j’y suis entrée et m’en suis envolée. Ça ne m’a pas amusée, non, mais c’eut été pire de supporter et de laisser ma vie s’évaporer ainsi, me balançant sur un perchoir devant une fenêtre donnant sur un jardin où tous les oiseaux libres m’appelaient, m’expliquant que c’était peut-être plus dur de guetter les lombrics et moucherons au lieu de picorer dans une mangeoire, mais que la tête ne me tournerait plus à force de jouer les demoiselles sur la ba-lan-çoire, ivre d’ennui.

Je n’étais pas contre les hommes, encore moins tout contre (merci Sacha), et l’idée de passer ma vie aux côtés de l’un d’entre eux (qui à l’époque était un tout jeune homme…) ne m’épouvantait pas, si ce l’un d’entre eux m’avait inspirée. Mais c’était le parcours fléché de mon avenir qui ne me plaisait pas. Il fallait rencontrer et intéresser un jeune homme ayant fait les bonnes études et provenant du bon cercle social, et me préparer à franchir toutes les cases dans le bon ordre, sans bien sûr me retrouver en prison, interdite de participer aux trois prochains tours, ou à la case départ. Pour ce faire, que de choses peu attirantes à entreprendre, et les rares visites à des beaux-parents potentiels m’avaient fichu le bourdon. Oui.

Car… et l’amour, où était-il ? Pas dans ces jeunes gens, en tout cas. Où résidait l’amour dans le fait que bien que A m’aurait fait rire plus souvent ce serait peut-être B qui lui, s’intéresserait à moi et me présenterait à sa tribu, et que bien qu’il ne soit pas abominable, le pauvre B, je penserais toujours qu’avec A, ma foi…

Un de perdu, dix de retrouvés, disait-on, et ça semblait être sinistrement vrai. Hommes et femmes étaient interchangeables, tout se valait. Il suffisait d’être un bon parti et une bonne petite bien élevée.

Moi j’en voulais un que personne ne remplacerait. L’unique.

Je ne voulais pas un mari, mais un amour. Qui me ferait rire et m’aimerait comme je l’aimerais. Même s’il n’avait pas fait d’études ! Que c’était donc soporifique, cette conversation qui commençait par et tu fais quoi, comme études ?