Achetez aujourd’hui, vous payerez plus tard

Ecrit pour Pulp.com le 12 avril 2009

 

Toute la culture américaine est basée sur le rêve, l’ambition, le voir en grand. Une vie à crédit. Une vie où on achèterait aujourd’hui, pour payer quand on pourrait. Morts, si possible. C’était si simple, jugez donc :

Une annonce télévisée d’Escrocs, filous et compagnie l’affirmait : on pouvait par leur entremise acheter une voiture neuve avec un simple dépôt de $100, pour autant qu’on ait un boulot. Quel boulot ? Qu’importait ! Au premier paiement de retard, hop, gnap, Escrocs, filous et compagnie reprenait la voiture, gardait l’argent déjà versé, vous poursuivait en justice histoire d’y gagner encore un peu, et ne s’y perdait vraiment pas.

Pour les fêtes de fin d’années, la télévision vous donne la curieuse impression que vous êtes un salaud de la pire espèce si vous n’achetez pas un diamant à votre femme, trois jeux vidéo à chacun de vos enfants, un éventail d’instruments de torture destinés à la fitness de la famille et la rénovation du parquet pour recevoir dignement. Les compagnies véreuses offrant des prêts de $200 à des gens n’ayant aucune garantie bancaire (bien des gens n’ont même pas de compte en banque…) lancent leur chant de séduction. Ça semble si simple : empruntez $200 aujourd’hui, et rendez-en $230 … la semaine prochaine ! Du retard ? Désolés, absolument désolés, mais ça fera $260, maintenant ! Les usuriers se font une fortune sur des gens qui n’ont rien mais que l’on pousse, eux aussi, à rêver avec démesure. Ils ont droit à la même chose que les autres, leur serine-t-on. Aucune loi pour limiter le pouvoir de ces chacals, et leur horde traque les rêveurs sans relâche, crocs exposés, le poil de l’échine hérissé.

Et maintenant qu’on les a endettés pour trois générations, on leur propose de les sauver en leur rachetant leur or. Les alliances, boucles d’oreille de mémé, dents d’or de pépé, montres de communion vont finir dans les mains griffues d’ Escrocs, filous et compagnie déguisés en dernière chance