C’est la nuit qu’il est beau de croire à la lumière

(Edmond Rostand, hein !)

C’est difficile, ça semble parfois même impossible.

Certes, le monde a toujours grouillé d’immondes démons assis sur différents trônes de pouvoir, des démons qui n’ont d’humain que l’apparence (pour certains, je dois quand même dire qu’ils ressemblent beaucoup aux démons classiques des fresques et collections de gargouilles, mais ça n’a pas l’air de frapper tout le monde…). Comme un nuage de pipistrelles noires et griffues, ils combattent bel et bien les humains. Certains les séduisent (incubat-succubat, refrain bien connu) et corrompent leur essence, avec leur autre refrain ensorceleur « Aie confiannnnce » du célèbre Kaa.

Autrefois, on savait, mais on savait moins et pas tout à la fois. Et puis on savait ce qu’on voulait qu’on sache, d’ailleurs : que les Amérindiens étaient des sauvages bavant du sang par lèvres et narines, que les soldats étaient des braves offrant leur torse – dans lequel battait un cœur pur – aux flèches, baïonnettes, grenades, sagaies, sabres, poignards, épées, tomahawks pour défendre leur future veuve et leurs futurs orphelins et leur offrir une vie digne. Les affreuses sorcières de Salem et leurs orgies diaboliques avaient mérité mort et procès. Que ce soit pour avoir mangé de l’ergot de seigle aura été évident pour certains même à l’époque mais… qu’il était facile de battre la peur en neige pour avoir de serviles imbéciles empressés à sauver la gloire de Dieu et de la vertu.

Rien n’a vraiment changé, sauf que désormais les rumeurs, nouvelles, théories et autres informations nous arrivent de partout et à la vitesse de la lumière, on se sent entourés de guerres, virus, réfugiés, misères sociales, trafics variés, famines, sécheresses ou inondations. On nous conseille de croire à tout ce qui pourrait nous faire nous lever comme un seul homme au bénéfice de nos démons de service, d’avoir de la compassion et l’aumônière prête pour aider sur tous les fronts, en même temps qu’on nous bourre de xanax, tisanes relaxantes, séances de bol tibétain et de méditation pour « rester zen » au milieu de ce gigantesque tableau de Jérôme Bosch dans lequel nous nous trouvons.

Nous avons perdu toute confiance, les mensonges carambolent sur notre chemin, les dirigeants fous délirent, menacent, annoncent sanctions et mesures de plus en plus sévères, immolent publiquement sur le bûcher qui ose s’opposer (Julian Assange et tant, trop d’autres…). Tout ça existait déjà (il suffit d’ailleurs de lire les nombreuses citations exhumées récemment et qui nous rappellent que Platon, Sénèque, Churchill, Orwell, Mandrin et toute une longue kyrielle d’autres ont eu vent de situations semblables…). Nous sommes dans le noir, dans une grotte puante, l’âme fouettée par les ailes de pipistrelles, assourdis par leurs cris.

L’avenir n’a plus de forme. Le passé, c’est évident, était le temps de l’innocence, et on nous l’a piétinée.

Alors je veux vraiment revenir à Chantecler, à Edmond Rostand. C’est maintenant qu’il est beau de croire à la lumière. Nous ne pouvons ni aimer ni sauver tout le monde. Aimons nos proches, protégeons-les, renforçons leur coeur avec des valeurs véritables, aidons-les à ne pas disperser et gaspiller leur énergie dans des drames qui ne sont pas les leurs.

Je me souviens avoir lu, il y a longtemps, Les 100 premières années de Nino Cochise. Il s’agissait des mémoires du petit-fils de Cochise, le grand chef apache. Jeune homme, il posait des questions sur ses parents, Cochise etc… au sachem, qui lui répondait quelque chose comme « si tu n’étais pas là, c’est que ça ne te regarde pas ». Ça m’avait frappée et depuis j’ai toujours pensé que si je devais être impliquée dans quelque chose, l’appel, les circonstances, ou le fait de me trouver au centre de ce quelque chose m’impliqueraient automatiquement. Pas besoin de chercher, parmi toutes les horreurs qui éventrent la planète, ce que je peux faire. J’ai une famille, des amis chers, j’ai même eu des animaux, tous êtres envers lesquels le destin m’a donné une responsabilité. Responsabilité d’amour, de soutien, d’ouverture. Ce sont eux, ma lumière. C’est à eux que je me dois de garder la confiance, l’intégrité. Ne pas leur mettre des œillères mais ne jamais effacer la notion du Bien, de la lumière, de l’ordre qui suit le chaos, de la lutte séculaire avec les ténèbres qui n’a pas encore eu de vainqueur, et de l’armure que nous avons, entretenons et léguons de combattant à combattant.

Ce point fixe de lumière, nous pouvons le transmettre, le faire rayonner. C’est un beau combat, faire reculer les ténèbres, sauver nos justes, qui sauvent les leurs, et forment un réseau de combattants…

16 réflexions sur “C’est la nuit qu’il est beau de croire à la lumière

  1. hamesse dit :

    Nous arriverons à avancer dans ce chaos , ils n’auront pas notre peau, nous sommes fortes 🙂

  2. Angedra dit :

    Il y a beaucoup plus d ombres actuellement que de lumières avec chaque jour son lot de crimes de toutes sortes et la violence qui gravit tous les échelons de notre société.
    Si cela ne suffit pas nous avons droit à un supplément avec des annonces de futures catastrophes qui nous menacent. Tremblez braves gens …
    Alors, oui tu as raison ma responsabilité moi aussi je la dois à mon entourage, à ceux que j aime et que je me dois de protéger.

    • Edmée dit :

      Tu as raison, si nous nous laissons abattre par tout ce contre quoi nous ne pouvons rien faire, ou ce qui va peut-être arriver mais peut-être pas, nous n’aurons pas la force de soutenir notre entourage. Aimons notre prochain, nos proches, et chacune participera à une muraille contre la noirceur de ces temps…

  3. emma dit :

    Bien sombres constats !
    W. Shakespeare a écrit quelque part (mais où ? chat GPT nous le dirait ) : « L’enfer est vide, tous les démons sont ici-bas. »

    « si tu n’étais pas là, c’est que ça ne te regarde pas « . Absolument ! nous ne pourrons avancer (à supposer que ce soit possible) qu’en arrêtant les repentances absurdes et inutiles.
    Si chacun se contenait de chérir son petit bout de planète et préserver ce qu’il y a dessus, « défi du colibri, en somme », au lieu de faire la morale au voisin, et des plans sur la comète, ça serait déjà bien ! (pas trop de lumière la nuit quand même !)

    bon week end, Edmée !

    • Edmée dit :

      😉 Non, la nuit on dort, et on répare les dommages de la nuit diurne 🙂 Tu as raison, normal que je le dise puisque tu rejoins ce que j’ai étalé… Merci et bon week end aussi!

  4. Pascale MD dit :

    Cette planète aurait été la plus belle des merveille si toutefois l’Homme n’était pas apparu.
    Comme quoi la nature fait aussi des erreurs 😉
    Bonne journée.

  5. « Ils ont essayé de nous enterrer. Ils ne savaient pas que nous étions des graines. » : Proverbe mexicain.

  6. celestine dit :

    Oh la la ! Mais qu’est-ce que ça fait du bien de lire ça…A certains moments, avec certains bipèdes de mon entourage, j’ai l’impression de passer toujours complètement à côté de la plaque parce que je refuse de me laisser enfermer dans le fatalisme et la sinistrose.
    Bien sûr qu’on va tous crever dans d’atroces souffrances. Mais est-ce qu’on pourrait un peu kiffer la life cinq minutes, quand même,
    ou bien ?
    Baci sorella, de tout coeur.
    •.¸¸.•*`*•.¸¸☆

    • Edmée dit :

      Je ne suis même pas certaine des atroces souffrances, il y a les gentils dodos dont on ne s’éveille pas, il y a les lents au revoir sereins avec ceux qu’on aime à qui on dit de ne pas pleure, il y a les morts-éclairs boum qu’on ne voit pas passer… Mais en tout cas, jusque là… c’est bien bon d’être ici et d’avoir de quoi sourire le matin! Baci baci, cara sorellita8

  7. Myosotis dit :

    Oh oui que tout cela est bien dit et fait du bien. Vivons, aimons et colibrions ensemble 🙂

  8. Contente de vous retrouver, même avec un peu de retard, sur votre blog. Les liens de pensée y sont mis en forme de façon séduisante et créent des échanges sympathiques comme les nôtres …

  9. Martine dit :

    Bonjour Edmée,
    une fois de plus, je constate que nous pensons de même. Tu parles du petit fils de Cochise. j’avais la sa transcription des mémoires de son grand-père. C’était du temps de chez Makaire. J’avais dévoré ce gros livre. mais impossible de me souvenir des références.
    Merci Edmée. Gardons espoir en apportons notre petite pierre à « consolider » l’édifice.
    🙂

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